Nicole HACHEA é tablit un solide contact intellectuel et sensuel avec ce matériau qui l’obsède,
qui déclenche en elle les idées primordiales qu’elle va développer graduellement jusqu’à
l’obtention d’un produit artistique personnel et engageant. Son sens inné de la structure
réglementée se présente au préalable chez Haché: elle voit, elle trouve, elle récupère, elle
déplace, elle archive ses biens, ses matériaux. Les œuvres vont naı̂tre par après, suite à une
longue ré Rlexion sur la nature innée des composantes de son art. Un contact accru avec des
matières organiques est manifeste, et Haché explore les rapports physiques et structuraux
existants à maints niveaux à même cette nature.
Samares, titre accordé au projet intégral de Nicole Haché lors de sa résidence La Baie des
Chaleurs, habiter la mer intérieure en juillet 2024, est né d’une rencontre fortuite avec
plusieurs érables ancestraux autrefois plantés devant l’Hô tel de ville de Caraquet. En raison
de leur vieillissement, ces arbres ont é té abattus et remplacés par d’autres espèces cultivées
en serre. En mai 2024, par une journée de pluie, Haché interroge les responsables, à savoir si
elle peut recueillir ses matériaux à partir de ce qui reste suite à l’abat de ces arbres, éparpillés
ici et là sur le gazon.
Sa collecte donne lieu à un inventaire de troncs, de branches, de jeunes pousses et de samares
— ces graines ailées caractéristiques de l’érable. Un soin mé thodique s’impose : les matériaux
sont classés, analysés selon leur essence et leur potentiel d’activation une fois transposés en
salle d’exposition.
Haché cherche ainsi à insérer l’essence de l’arbre — et, par extension, de la nature — dans un
contexte humanisé, où une présentation visuelle rigoureusement orchestrée déconstruit
l’arbre en ses composantes essentielles, le rendant signiRiant à travers un système de
catégories et d’ensembles descriptifs de cette “nature” disparue qui é tait autrefois.
L’abattage a suscité une vive réaction parmi la population, révélant l’attachement profond que
l’on porte à ces ê tres végé taux ancrées dans notre quotidien. Cette émotion collective a amené
l’artiste à s’interroger sur la portée de ce lien affectif et à explorer la relation entre l’arbre
urbain et l’arbre indigène. Pourquoi accorde-t-on plus d’importance à l’arbre qui partage
notre espace de vie, que l’on croise chaque jour, qu’à celui enraciné dans un écosystème
naturel, souvent invisible aux yeux des citadins ? A^ travers un assemblage sculptural de
branches d’érables — emblèmes de l’arbre urbain — et de cornouillers stolonifères —
symboles de la Rlore indigène — l’artiste é tablit un dialogue visuel et symbolique. Cette mise
en relation souligne les tensions et les complémentarités entre nature domestiquée et nature
originelle, interrogeant notre hiérarchie émotionnelle face au vivant.
On assiste ici à un phénomène qui met en valeur la maı̂trise matérielle rendue possible grâce
à un engagement et à une dévotion quasi obsessionnelle de l’artiste vis-à-vis d'une nature qui
devient alors é ternellement malléable
Paul EA douard BourqueCommissaire

Nicole Haché establishes a solid intellectual and sensual contact with this material that obsesses her, triggering in her the primordial ideas that she will gradually develop until obtaining a personal and engaging artistic product. Haché'snatural sense of regulated structure presents itself beforehand: she sees, she finds, she recovers, she moves, she archives her possessions, her materials. The artworks are born later, following a long reflection on the inborn nature of the components of her art. Increased contact with organic materials is evident, and Haché explores the physical and structural relationships existing at many levels within this nature.

Samares, the title given to Nicole Haché's entire project during her residency in La Baie des Chaleurs, inhabiting the inland sea in July 2024, was born of a fortunate encounter with several ancestral maple trees once planted in front of the Caraquet Town Hall. Due to their ageing, these trees were cut down and replaced by other species grown in greenhouses. On a rainy day in May 2024, Haché asked the people in charge if she could collect materials from what remained of the trees, scattered here and there on the lawn.

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Her collection gives way to an inventory of trunks, branches, young shoots and samaras - the winged seeds characteristic of the maple tree. Methodical care is required: materials are classified, analyzed according to their essence and their potential for activation once transposed into the exhibition room. In this way, Haché seeks to insert the essence of the tree - and, by extension, of nature - into a humanized context, where a rigorously orchestrated visual presentation deconstructs the tree into its essential components, rendering it meaningful through a system of categories and descriptive sets of the vanished “nature” that once was.

The felling sparked a strong reaction among the population, revealing the deep attachment we have to these vegetal beings anchored in our daily lives. This collective emotion led the artist to question the scope of this emotional bond, and to explore the relationship between the urban tree and the native tree. Why do we give more importance to the tree that shares our living space that we come across every day than to the one rooted in a natural ecosystem, often invisible to city dwellers? Through a sculptural assemblage of maple branches - emblems of the urban tree - and stoloniferous dogwoods - symbols of indigenous flora - the artist establishes a visual and symbolic dialogue. This relationship underlines the tensions and complementarities between domesticated and native nature, questioning our emotional hierarchy in relation to living things.

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Here we witness a phenomenon that highlights the material control made possible by the artist's almost obsessive commitment and devotion to a nature that then becomes eternally malleable.

Paul Édouard Bourque

Curator